Les marchés boursiers européens restent aux prises avec les conséquences de la pandémie. Pourtant, les investisseurs avisés dont le regard se porte au-delà de la crise peuvent identifier des cibles d’investissement surprenantes au milieu du naufrage, y compris dans des secteurs comme l’aérospatiale et la distribution, qui ont été particulièrement affectés.

Les valeurs européennes s’inscrivent en retrait de leurs homologues mondiales pour l’année en cours. Au 24 septembre 2020, le MSCI Europe chutait de 12,2 % en devise locale, tandis que le MSCI World ne cédait dans le même temps que 1,7 % et que le S&P 500 progressait de 1,9 %. Pour nous, ce décalage s’explique en partie par la perception, au début de la crise, d’une Europe moins à même que d’autres régions de contenir la propagation du virus. Pourtant, malgré des succès encourageants dans de nombreux pays européens, des mesures de confinement déterminantes et une coopération étonnante à l’échelle de la région, le redressement opéré par l’Europe ne se reflète pas encore pleinement dans les cours des actions.

Des questions plus pointues pour des marchés plus chahutés

Bien entendu, cette crise n’est semblable à aucune autre. Par conséquent, en plus de leurs vérifications de due diligence habituelles, les investisseurs devraient se poser plusieurs questions lors de l’analyse d’une société. Quel a été l’impact précis sur la demande et pendant combien de temps ? La destruction de la demande est-elle le résultat de changements comportementaux ou structurels ? La dynamique concurrentielle du secteur a-t-elle changé ? Le bilan de la société concernée est-il suffisamment solide pour survivre à cette période éprouvante ? Et, pour finir, dans quelle mesure les investisseurs peuvent-ils se fier aux réponses à ces questions, eu égard à l’incertitude entourant la pandémie et la croissance macroéconomique ?

Les investisseurs ne devraient pas exclure systématiquement les secteurs en difficulté au moment de poser de telles questions. En effet, deux secteurs qui pourraient sembler peu propices à l’investissement méritent qu’on s’y attarde : la distribution et l’aérospatiale.

Aérospatiale : identifier des sociétés capables de faire face au stress

L’industrie aérospatiale européenne traverse une période de crise sans précédent. Les entreprises sont en effet confrontées à une forte chute de la demande, causée par la fermeture quasi totale de l’aviation commerciale sur décision des gouvernements. Par ailleurs, les changements de comportement font eux aussi des ravages : les touristes hésitent encore à prendre l’avion, préférant passer leurs vacances plus près de chez eux, tandis que les voyages d’affaires ont été largement remplacés par les vidéoconférences.

Faut-il y voir la fin des vacances à forfait et des voyages d’affaires ? Probablement pas. Les gens aiment voyager. En Chine, premier pays à sortir du confinement, les volumes de passagers ont de nouveau augmenté, pour s’établir à environ 80 % des niveaux observés avant la pandémie. Nous pensons que l’Europe devrait connaître un phénomène similaire une fois que la pandémie se sera calmée (graphique).

Dans un tel contexte, certains transporteurs historiques pourraient ne pas survivre. Néanmoins, les entreprises plus agiles directement exposées aux perturbations à court terme pourraient être mieux positionnées pour une reprise à long terme. Par exemple, la société AerCap, basée en Irlande, loue des appareils à des compagnies aériennes. En cette période où les grands transporteurs aériens hésitent à acheter de nouveaux avions, AerCap pourrait profiter du manque de visibilité en termes de planification. Par ailleurs, la société est payée même lorsque ses avions sont à moitié vides ou restent cloués au sol. La compagnie aérienne à bas prix Wizz Air (Hongrie) est un autre exemple. Le transporteur se targue d’avoir des coûts peu élevés et son chiffre d’affaires ne dépend pas des voyages d’affaires.

Distribution : la montée en puissance du commerce en ligne favorise la transition numérique

Le secteur de la distribution en Europe apparaît sous un jour différent. On note un net contraste entre les gagnants et les perdants économiques du confinement. Les sociétés totalement en ligne ou déjà très présentes sur le net sont en plein essor. Dans le même temps, les chaînes historiques, largement dépendantes de leurs magasins « physiques » éprouvent encore plus de difficultés qu’avant l’apparition de la pandémie.

Avant le COVID-19, les Européens étaient moins familiarisés avec les achats en ligne que les consommateurs américains ou asiatiques. Certains segments de la clientèle, comme les personnes âgées, s’en méfiaient. Le confinement les a pratiquement forcés à sauter le pas, ce qui a généré une nouvelle source de demande durable pour le secteur de la distribution en ligne. Au Royaume-Uni, par exemple, la croissance mensuelle des achats en ligne s’est nettement accélérée, passant de moins de 10 % au début de l’année 2020 à plus de 40 % ces derniers mois, dopant ainsi le taux de pénétration de la distribution numérique (graphique).

Ces tendances permettent aux entreprises mieux armées pour négocier la transition vers les achats en ligne de se différencier. C’est notamment le cas du détaillant de vêtements Next Retail et du fabricant de bijoux fantaisie PANDORA. Le Britannique Next, qui était au départ une société de vente par correspondance, a toujours bénéficié d’une forte présence en ligne. Les produits PANDORA sont taillés pour la vente en ligne et l’entreprise danoise avait déjà lancé un programme visant à accroître sa présence en ligne avant la crise. Ces deux sociétés ont récemment surpassé les attentes en termes relatifs. Les entreprises qui ont moins bien réussi à moderniser leur modèle économique commencent tout juste à réduire leur dépendance vis-à-vis des magasins « physiques » et auront besoin de temps pour rattraper leur retard.

Les marchés d’actions européens restent loin derrière leurs homologues américains. Quoi qu’il en soit, cette sous-performance est également source d’opportunités pour les investisseurs qui abordent les entreprises européennes de façon sélective et s’appuient sur la recherche. Dans des secteurs malmenés comme l’aérospatiale et la distribution, les investisseurs peuvent selon nous trouver des sociétés mal comprises, dotées d’une dynamique commerciale étonnamment forte et capables d’afficher un potentiel de performance à long terme attrayant à mesure que la reprise s’installe dans la région.

Tawhid Ali est Chief Investment Officer — European Value Equities chez AllianceBernstein (AB)

Andrew Birse est Gérant de portefeuille — European Value Equities chez AB

Les opinions ici exprimées ne sauraient être considérées comme une recommandation en vue de réaliser une quelconque transaction, un conseil en investissement ou le résultat de recherches. Elles ne reflètent pas nécessairement l’opinion de l’ensemble des équipes de gestion de portefeuille d’AB et peuvent évoluer à tout moment. AllianceBernstein Limited est autorisée et réglementée par la Financial Conduct Authority au Royaume-Uni.

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