Les valeurs technologiques sont-elles trop chères ? Certains mythes ont la vie dure !

03 septembre 2020
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Face à l’appréciation des valeurs technologiques, beaucoup d’investisseurs se demandent si les prix ne sont pas devenus excessifs. Toutefois, même avec des valorisations élevées, nous pensons que l’environnement technologique continue de leur offrir un potentiel de croissance à long terme.

L’ascension des valeurs technologiques paraît irrésistible. Les géants comme Apple et Microsoft, tout comme les sociétés de produits de consommation liées aux technologies, telles Amazon et Alibaba Group, continuent de progresser en Bourse malgré la pandémie de COVID-19. Parallèlement, un nouveau groupe de leaders innovants et résilients, allant des prestataires de services sur le cloud aux fintechs en passant par les facilitateurs du commerce électronique, affiche également une croissance robuste portée par les changements rapides provoqués par la pandémie dans les habitudes de consommation et de travail.

L’indice Nasdaq Composite, au sein duquel les valeurs technologiques sont très représentées, a bondi de 20,5 % entre le 1er janvier et le 31 juillet, tandis que l’indice MSCI World Technology s’est adjugé 20,8 % sur la même période. À en juger par les rebonds moins prononcés du S&P 500 et du MSCI World, il est évident que la préférence des investisseurs va largement au secteur technologique.

Résultat, les valorisations ont grimpé en flèche : les actions technologiques mondiales se négocient sur la base d’un ratio cours/bénéfices prévisionnel de 26,5x, soit une prime de 30 % par rapport à l’indice MSCI World. Cet écart est-il justifié ou résulte-t-il davantage « d’esprits animaux » irrationnels ? En cette époque sans précédent, nous considérons que certaines valorisations élevées se justifient, notamment pour les entreprises dotées de moteurs de croissance pérennes. Pour identifier les bonnes opportunités, les investisseurs doivent simplement déconstruire quelques mythes.

Mythe n°1 : Tout le secteur technologique est surévalué

Le secteur des technologies n’est pas homogène, et toutes les entreprises technologiques ne sont pas surévaluées. En réalité, la prime de valorisation du secteur est assez faible par rapport à son plus haut niveau historique (graphique).



Au pic du marché en mars 2000, les secteurs des technologies et des services de communication représentaient 35 % de la capitalisation de l’indice MSCI World et moins de 18 % de ses bénéfices. Aujourd’hui, leur poids s’élève à 30 % de la capitalisation de l’indice, mais à presque 25 % de ses bénéfices (Graphique). Pourquoi ? Dans un monde toujours plus connecté, les entreprises technologiques bénéficient de plus en plus d’un effet réseau positif, qui leur permet de profiter d’économies d’échelle et de dégager des marges supplémentaires plus élevées.

Mythe n°2 : Valorisation élevée = risque élevé

Est-il plus risqué de payer plus pour une action ? Pas forcément, d’autant que les motifs et les perceptions qui justifient des valorisations élevées peuvent varier considérablement. Les entreprises technologiques dotées de moteurs de croissance séculaires, par exemple, sont considérées comme offrant une meilleure visibilité sur la croissance de leurs bénéfices par rapport aux sociétés reposant sur des moteurs cycliques, jugées plus tributaires de tendances macroéconomiques affectées par la pandémie et donc plus risquées.

Dans la saison de publication des résultats actuelle, les entreprises de technologies de l’information font partie des très rares à avoir fait état d’une hausse annuelle de leurs chiffres d’affaires et de leurs bénéfices. De plus, elles ont largement dépassé les anticipations du consensus. Environ 74 % des entreprises de technologies de l’information de l’indice MSCI World ont annoncé une hausse de leurs prévisions de chiffres d’affaires et 78 % ont publié des bénéfices supérieurs aux attentes, contre respectivement 51 % et 56 % des entreprises tous secteurs confondus (Graphique).



Selon nous, ces valorisations plus élevées reflètent la faible tolérance au risque de l’ensemble des investisseurs. Actuellement, les entreprises technologiques se négocient à des valorisations comparables à celles des sociétés de la consommation de base, alors qu’elles offrent de meilleures perspectives de croissance. Ainsi, les actions des magasins de détail physique et des entreprises technologiques offrant des services et des équipements informatiques sur site peuvent donner l’impression d’être meilleur marché, mais elles pourraient encore diminuer si la pandémie persiste et que les forces défavorables s’intensifient.

La faiblesse des taux d’intérêt profite aussi aux perspectives de croissance des technologies. Les entreprises à forte croissance ont en effet tendance à disposer de meilleurs flux de revenus issus de la hausse future de leurs chiffres d’affaires et de leurs bénéfices. Par conséquent, quand les taux d’intérêt restent faibles, les flux de revenus de ces entreprises sont avantagés par des taux d’actualisation plus réduits qui contribuent à doper les prix des actions.

Mythe n°3 : Plus une question de valorisation que de fondamentaux

La valorisation est-elle bien le sujet du débat, et n’accorde-t-on pas trop d’importance au prix au détriment du potentiel de croissance bénéficiaire ? C’est effectivement notre avis.

Vous souvenez-vous de la première génération d’iPhone en 2007 ? Les actions d’Apple atteignaient un plus haut hallucinant de 18 USD environ, sur la base d’estimations prévoyant 3 millions d’unités vendues dans le monde pendant la première année de commercialisation. Comparez ce chiffre aux 200 millions vendus chaque année désormais. C’est maintenant une histoire bien connue, comme d’ailleurs celle d’Amazon, dont l’action a toujours été accusée d’être trop chère. Mais même avec un chiffre d’affaires courant de 280 milliards USD fin 2019, l’entreprise dépasse chaque fois les estimations des analystes tout en améliorant sa rentabilité.

Des entreprises technologiques innovantes peuvent paraître chères si on les considère seulement au regard de l’estimation du consensus à un moment précis. Mais les vrais leaders ont de la vision et de la ténacité. Ils s’améliorent continuellement et se réinventent sans cesse pour garder un avantage concurrentiel, avec de nouveaux produits et services répondant à l’évolution et à la croissance des besoins du marché. Parfois, le succès nécessite de rompre avec leur modèle économique actuel afin de garantir l’avenir, et c’est peut-être l’un des actes les plus difficiles et les plus controversés. Pensez à Netflix, au départ un service performant de location de DVD par correspondance, qui a créé la surprise en lançant un tout nouveau système de vision en streaming, fort de 193 millions d’abonnés aujourd’hui. Ou à Amazon. Cette librairie en ligne traditionnelle s’est développée pour devenir une locomotive technologique incluant des services de commerce de détail, de publicité, de médias en streaming, de logistique et d’infrastructure sur le cloud. Et tout au long de cette transformation, les analystes ont sous-estimé le potentiel de croissance du groupe et sa viabilité en faisant une mauvaise lecture des risques ou en n’appréciant pas les bénéfices à leur juste valeur.

Une entreprise à succès innovante est plus qu’une nouvelle bonne idée. Les moteurs d’innovation pérennes doivent procurer un potentiel de croissance durable des revenus et des bénéfices. Il se trouve en ce moment que des quantités importantes de liquidités sont en quête d’opportunités de croissance très peu nombreuses, dont beaucoup sont des entreprises plus petites et moins en vue. Toutes ne sont pas le prochain Amazon, mais certaines possèdent peut-être les bonnes caractéristiques pour devenir les leaders de la nouvelle génération : des produits et services à l’impact transformationnel, et l’esprit d’innovation inhérent qui leur permet de se réinventer en permanence tout au long de leurs trajectoires de croissance. Si leurs valorisations peuvent parfois sembler élevées au regard des estimations à court terme, en définitive, l’exercice le plus décisif pour les investisseurs dans l’innovation technologique consiste à identifier les prochains leaders de la rupture, capables d’offrir une croissance durable et sous-estimée au-delà de leur essor immédiat.

Les opinions ici exprimées ne sauraient être considérées comme une recommandation en vue de réaliser une quelconque transaction, un conseil en investissement ou le résultat de recherches. Elles ne reflètent pas nécessairement l’opinion de l’ensemble des équipes de gestion de portefeuille d’AB et peuvent évoluer à tout moment. AllianceBernstein Limited est autorisée et réglementée par la Financial Conduct Authority au Royaume-Uni.

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