Selon nous, ces valorisations plus élevées reflètent la faible tolérance au risque de l’ensemble des investisseurs. Actuellement, les entreprises technologiques se négocient à des valorisations comparables à celles des sociétés de la consommation de base, alors qu’elles offrent de meilleures perspectives de croissance. Ainsi, les actions des magasins de détail physique et des entreprises technologiques offrant des services et des équipements informatiques sur site peuvent donner l’impression d’être meilleur marché, mais elles pourraient encore diminuer si la pandémie persiste et que les forces défavorables s’intensifient.
La faiblesse des taux d’intérêt profite aussi aux perspectives de croissance des technologies. Les entreprises à forte croissance ont en effet tendance à disposer de meilleurs flux de revenus issus de la hausse future de leurs chiffres d’affaires et de leurs bénéfices. Par conséquent, quand les taux d’intérêt restent faibles, les flux de revenus de ces entreprises sont avantagés par des taux d’actualisation plus réduits qui contribuent à doper les prix des actions.
Mythe n°3 : Plus une question de valorisation que de fondamentaux
La valorisation est-elle bien le sujet du débat, et n’accorde-t-on pas trop d’importance au prix au détriment du potentiel de croissance bénéficiaire ? C’est effectivement notre avis.
Vous souvenez-vous de la première génération d’iPhone en 2007 ? Les actions d’Apple atteignaient un plus haut hallucinant de 18 USD environ, sur la base d’estimations prévoyant 3 millions d’unités vendues dans le monde pendant la première année de commercialisation. Comparez ce chiffre aux 200 millions vendus chaque année désormais. C’est maintenant une histoire bien connue, comme d’ailleurs celle d’Amazon, dont l’action a toujours été accusée d’être trop chère. Mais même avec un chiffre d’affaires courant de 280 milliards USD fin 2019, l’entreprise dépasse chaque fois les estimations des analystes tout en améliorant sa rentabilité.
Des entreprises technologiques innovantes peuvent paraître chères si on les considère seulement au regard de l’estimation du consensus à un moment précis. Mais les vrais leaders ont de la vision et de la ténacité. Ils s’améliorent continuellement et se réinventent sans cesse pour garder un avantage concurrentiel, avec de nouveaux produits et services répondant à l’évolution et à la croissance des besoins du marché. Parfois, le succès nécessite de rompre avec leur modèle économique actuel afin de garantir l’avenir, et c’est peut-être l’un des actes les plus difficiles et les plus controversés. Pensez à Netflix, au départ un service performant de location de DVD par correspondance, qui a créé la surprise en lançant un tout nouveau système de vision en streaming, fort de 193 millions d’abonnés aujourd’hui. Ou à Amazon. Cette librairie en ligne traditionnelle s’est développée pour devenir une locomotive technologique incluant des services de commerce de détail, de publicité, de médias en streaming, de logistique et d’infrastructure sur le cloud. Et tout au long de cette transformation, les analystes ont sous-estimé le potentiel de croissance du groupe et sa viabilité en faisant une mauvaise lecture des risques ou en n’appréciant pas les bénéfices à leur juste valeur.
Une entreprise à succès innovante est plus qu’une nouvelle bonne idée. Les moteurs d’innovation pérennes doivent procurer un potentiel de croissance durable des revenus et des bénéfices. Il se trouve en ce moment que des quantités importantes de liquidités sont en quête d’opportunités de croissance très peu nombreuses, dont beaucoup sont des entreprises plus petites et moins en vue. Toutes ne sont pas le prochain Amazon, mais certaines possèdent peut-être les bonnes caractéristiques pour devenir les leaders de la nouvelle génération : des produits et services à l’impact transformationnel, et l’esprit d’innovation inhérent qui leur permet de se réinventer en permanence tout au long de leurs trajectoires de croissance. Si leurs valorisations peuvent parfois sembler élevées au regard des estimations à court terme, en définitive, l’exercice le plus décisif pour les investisseurs dans l’innovation technologique consiste à identifier les prochains leaders de la rupture, capables d’offrir une croissance durable et sous-estimée au-delà de leur essor immédiat.