Investir durablement tout au long de la chaîne d'approvisionnement : véhicules électriques

22 octobre 2021
8 min read

L'ESG en action

Le passage aux véhicules électriques implique de modifier profondément la chaîne d'approvisionnement, mais aussi de relever de multiples défis ESG. Alors que l'industrie automobile s'efforce d'instaurer des pratiques durables, les investisseurs doivent intervenir auprès des gouvernements et des entreprises pour promouvoir et accélérer le processus de changement.

La problématique
Les moteurs des véhicules électriques requièrent beaucoup moins de composants que les moteurs à combustion interne, mais leurs batteries sont considérablement plus lourdes et complexes. Ces dernières contiennent quant à elles une plus grande proportion et une plus grande variété de minéraux – environ six fois plus que les véhicules conventionnels.
L'argumentaire d'investissement
Le développement de l'extraction et du traitement des minéraux est susceptible d’endommager l'environnement. Mais il apparaît clairement, selon nous, que les gouvernements et les entreprises réagiront favorablement à l'engagement constructif des investisseurs en vue d'améliorer leurs performances ESG.
Objectifs d'engagement
Le programme d'engagement d'AB vise à créer un dialogue mutuellement bénéfique avec les autorités publiques et les dirigeants d'entreprise, dans le but de promouvoir des pratiques durables tout au long de la chaîne d'approvisionnement.
Auteur(s)

L’industrie automobile est en train de basculer rapidement vers un avenir marqué par l'adoption du véhicule électrique (VE). Le tout électrique impacte très largement monteurs de véhicules, fabricants de composants, filières extractives – et investisseurs responsables.

Le passage aux véhicules électriques implique de modifier profondément la chaîne d'approvisionnement dans son intégralité. Les moteurs des véhicules électriques requièrent beaucoup moins de composants que les moteurs à combustion interne, mais leurs batteries sont considérablement plus lourdes et complexes. Ces dernières contiennent quant à elles une plus grande proportion et une plus grande variété de minéraux – environ six fois plus que les véhicules conventionnels. Or, l'extraction et le raffinage de ces minéraux s’accompagnent de multiples problématiques environnementales, sociales et de gouvernance (ESG).

Nos programmes de recherche et d'engagement nous ont permis de conclure qu'il faut suivre une approche globale pour identifier les entreprises qui sont gérées de manière à la fois rentable et responsable à chaque étape de la chaîne d'approvisionnement des véhicules électriques.

L'adoption croissante des véhicules électriques fait ressortir des enjeux ESG

AAlors que les constructeurs automobiles du monde entier et leurs sous-traitants déploient leurs stratégies de développement de nouveaux produits destinés aux véhicules électriques, l'industrie des VE se transforme rapidement pour passer du statut de fournisseur de niche à celui de producteur de masse. La demande de minéraux croît rapidement, de même que l’impact ESG qui en découle. Mais les questions éthiques ne s'arrêtent pas aux industries d’extraction. Qu'il s'agisse de la fabrication de composants automobiles, de l'assemblage de véhicules ou de l'infrastructure énergétique connexe (comme les services d'électricité aux collectivités et les fournisseurs de bornes de recharge), il est important de veiller à ce que la chaîne d'approvisionnement soit gérée et financée de manière responsable.

L'extraction et le traitement des minéraux sont les principaux sujets de préoccupation…

À travers l'ensemble de l'écosystème des véhicules électriques, on peut s'attendre à une augmentation spectaculaire de la demande de six types de minéraux : le cuivre et l'aluminium (notamment pour moderniser les réseaux électriques ainsi que pour le câblage, les moteurs et les boîtiers de batterie des VE) ; le cobalt, le lithium et le nickel (qui entrent dans la composition des batteries des VE) ; et les terres rares, un groupe d'éléments métalliques aux propriétés chimiques similaires utilisés dans les moteurs électriques. De ce fait, les avantages environnementaux et sociaux de la transition vers les véhicules électriques risquent d’être neutralisés par la pollution due aux déchets et de l'eau, mais aussi par les importantes émissions résultant de l'augmentation des activités d'extraction et de traitement des minéraux.

C'est pour cela que les investisseurs responsables doivent accorder une attention particulière à ces industries et s'engager non seulement auprès des producteurs mais aussi auprès des gouvernements. Après tout, les entités souveraines sont tenues d'instituer les cadres politiques nécessaires pour assurer le développement durable des industries.

…mais les véhicules électriques nécessitent également un large éventail de nouvelles technologies

L'extraction et le traitement des minéraux interviennent au début de la chaîne de valeur des véhicules électriques. Viennent ensuite la fabrication de cellules de batterie (la production de sources d'énergie électrique à partir de minéraux transformés), l'assemblage des blocs de batterie (qui consiste à assembler les différentes cellules individuelles dans des boîtiers composites) et la fabrication des véhicules électriques eux-mêmes (y compris l'intégration des batteries).

Chaque étape suppose des avancées technologiques. En conséquence, il est important de veiller à ce que les entreprises présentes à chaque maillon de la chaîne d'approvisionnement possèdent non seulement les ressources de recherche et développement adéquates, mais aussi la volonté de les appliquer de manière responsable. Par exemple, le groupe Volkswagen (VW) consacrera au cours des cinq prochaines années environ 73 milliards d'euros à l'électrification, aux groupes motopropulseurs hybrides et à la technologie numérique, un montant très nettement supérieur à celui investi par ses homologues européens. Plus récemment, General Motors (GM) s'est engagé à hauteur de 35 milliards de dollars américains d'ici 2025.

L'ère des véhicules électriques coïncide avec l'automobile 2.0

La transition vers les véhicules électriques est étroitement liée au projet plus vaste de « l’automobile 2.0 » qui s'inscrit dans l'ère de la conduite autonome. Cette initiative devrait se traduire par une réduction significative des émissions, à la fois par une utilisation plus économique des véhicules et par des techniques telles que le « platooning » (files de camions économes en carburant, se déplaçant de manière fluide à vitesse constante). Elle devrait également permettre de réduire le nombre d'accidents de la route et de décès.

D'un point de vue technologique, l'automobile 2.0 nécessitera des volumes de données et une capacité de traitement des données considérablement accrus, ainsi que des logiciels plus sophistiqués pour fabriquer le « cerveau » des véhicules nouvelle génération. Ces nouvelles capacités ont le potentiel de transformer l'expérience du déplacement et, avec elle, l'image de marque, la monétisation et les relations clients des fabricants d'équipements d'origine (OEM). Les investisseurs doivent s'engager auprès des entreprises pour s'assurer que leurs équipes dirigeantes sont prêtes à saisir cette multitude de nouvelles opportunités et à éviter l'obsolescence.

L'engagement favorise les pratiques durables

Nos recherches et notre programme d'engagement à l'échelle de l'entreprise nous révèlent que certaines entreprises adoptent avec succès des pratiques responsables et planifient le changement, tandis que d'autres accusent un certain retard. Nos rencontres successives avec les équipes dirigeantes nous ont par ailleurs clairement démontré que les entreprises réagiront favorablement à l'engagement constructif des investisseurs. S'il reste encore beaucoup de chemin à parcourir avant de pouvoir identifier les participants responsables à chaque maillon de la chaîne d'approvisionnement, nous continuons à travailler assidûment pour parvenir à cet objectif et nos progrès sont satisfaisants.

Études de cas :

  • une approche top-down pour la durabilité du Chili

     

    Le Chili, premier producteur mondial de cuivre, s'est fixé des objectifs ambitieux pour limiter ses émissions. Par conséquent, le pays pourrait devenir le chef de file mondial en matière de pratiques minières durables. Codelco est une société minière publique chilienne et le plus grand producteur de cuivre au monde.

    Dans le cadre de son processus d'engagement, AB a conseillé le gouvernement chilien début 2021 sur son objectif en matière de contributions (aux émissions) déterminées au niveau national (CDN) et plaidé contre le recours aux puits de carbone pour atteindre la neutralité carbone. Nous avons plutôt préconisé d'autres méthodes de réduction des émissions de carbone. Il s'agit notamment d’éliminer le charbon de façon accélérée dans le mix de production énergétique et de prôner des pratiques minières durables. Nous avons également plaidé en faveur de mesures top-down visant à garantir que, face à l'augmentation de la demande de cuivre liée à l'accélération des efforts de transition vers une économie à faible émission de carbone, l'exploitation minière respecte des normes environnementales et sociales rigoureuses. Nous avons cherché par ailleurs à améliorer le réseau de financement vert du Chili et avons souligné l'importance d'aligner tout futur cadre sur la taxonomie de l'Union européenne (UE).

    En outre, ces dernières années, nous avons eu des conversations directes avec Codelco (entre autres grandes sociétés minières) concernant ses plans de décarbonation et nous l'avons exhortée à améliorer la durabilité de ses opérations.

    Nos efforts ont contribué à l'obtention d'un résultat positif :
     

    • en septembre 2020, Codelco a présenté ses objectifs de durabilité pour 2030, un vaste engagement à réduire la pollution et la production de carbone tout en agissant sur les aspects sociaux
    • au troisième trimestre 2021, le ministère des Mines a publié les « lignes directrices de la politique minière nationale », qui mettent l'accent sur la durabilité


    Nous continuerons à suivre les progrès accomplis par le Chili sur le plan de ses objectifs de CDN actualisés. Nous prévoyons également d'autres engagements concernant les cadres de financement durable et d'autres considérations relatives à la durabilité.

  • SQM – production durable de lithium

     

    SQM est le deuxième plus grand producteur de lithium au monde et vise un doublement de sa capacité d'ici 2025. L'entreprise est réputée pour ses processus de fabrication écologiques et pour son engagement à améliorer la durabilité de l'ensemble de ses activités. SQM entend par exemple réduire de moitié sa consommation en eau d'ici 2030 et atteindre à ce même horizon la neutralité carbone dans ses principaux métiers.

    En avril 2021, nos équipes Gestion obligataire et Investissement responsable conjointes ont organisé une discussion avec la direction de SQM afin d’évoquer deux sujets importants. Résultat :
     

    • SQM a pu expliquer en quoi son processus de production est respectueux de l'environnement et dissiper toute confusion possible sur les risques environnementaux. La société produit du lithium par un processus d'évaporation à partir de saumures (eau salée), ce qui signifie que plus de 90 % de ses besoins énergétiques sont couverts par des énergies renouvelables – principalement l'énergie solaire. La direction a souligné que les saumures sont clairement différenciées de l'eau potable et séparées par une barrière argileuse imperméable sur les sites de l’entreprise. Ainsi, les éventuels changements concernant la disponibilité d'une eau potable rare pour les communautés locales ne sont pas liés à l'extraction de la saumure. SQM s'efforce d'être aussi transparente que possible dans son utilisation de la saumure. Elle dispose ainsi d'un site internet public indiquant les volumes de saumure utilisés et contacte les autorités environnementales en cas de modification des niveaux de saumure ou d'eau. Pour SQM, cette transparence permet aux parties prenantes d'être bien informées et limite les mesures qui auraient un impact négatif sur les activités de l'entreprise.
    • Nous avons également abordé des problématiques liées à la gouvernance et la rémunération des dirigeants. SQM a pu justifier ses dispositions en matière de rémunération et de gouvernance par la structure unique de son actionnariat, les circonstances locales et sa situation concurrentielle.


    Nous prévoyons de renouer le dialogue avec la direction de l'entreprise sur les thèmes de l'environnement et de la gouvernance au quatrième trimestre 2021, car elle a récemment publié son rapport de durabilité annuel en anglais.

  • VW – un plan détaillé pour une production durable de VE

     

    Le groupe VW s'est engagé à évoluer vers une gamme de produits exclusivement électriques. Il investit également dans la production de batteries en interne pour s’assurer d’être indépendant dans ce domaine clé. VW pourrait ainsi bénéficier d'un avantage en termes de conception circulaire de ses produits, le recyclage planifié des minéraux précieux constituant un facteur de différenciation potentiel entre les gagnants et les perdants du secteur. En outre, leur entrée de gamme de véhicules de tourisme est proposée à des prix parmi les plus bas du secteur, ce qui favorise une adoption rapide et généralisée des véhicules électriques.

    En juin 2019, nous avons rencontré la direction de VW pour discuter de la stratégie commerciale et des enjeux ESG. Nous avons à nouveau contacté le groupe au deuxième trimestre 2020, lorsqu'il a dévoilé son cadre de financement vert.

    Nous avons pu donner notre avis sur le cadre et expliquer pourquoi nous aimerions que des données ESG supplémentaires soient divulguées, par exemple pour mieux évaluer le risque d'esclavage moderne dans la chaîne d'approvisionnement. Nous avons salué les progrès réalisés par la direction de l'entreprise dans le cadre de sa stratégie de décarbonation et de sa vision stratégique à long terme, et nous l'avons exhortée à fixer des objectifs fondés sur la science et à donner un aperçu du degré d'alignement des activités du groupe sur la taxonomie de l'UE.

    Par la suite, en juin 2020, VW a validé ses objectifs de durabilité pour 2030 avec les réductions requises pour maintenir le réchauffement bien en dessous de deux degrés centigrades, conformément à l'accord de Paris sur le climat et sur la base de l'initiative Science Based Targets (SBTi).

    Nous avons l'intention de poursuivre notre dialogue ouvert avec le groupe sur sa stratégie en matière de véhicules électriques, et de tirer parti des résultats fructueux de notre engagement avec VW – en particulier, notre collaboration sur les cadres en matière d'obligations vertes – lors de nos rencontres avec les autres fabricants d'équipements d'origine.

    Ces études de cas constituent un petit échantillon de nos activités d'engagement en cours. Nous prévoyons de nombreux autres dialogues constructifs dans différents secteurs et zones géographiques, des réseaux électriques aux fournisseurs de bornes de recharge, et des marchés développés aux marchés émergents, y compris la Chine.

La transition vers les VE exige des structures de financement vert

Nous soutenons par ailleurs un financement responsable parallèlement à une gestion responsable. Nous estimons que les obligations vertes et les obligations basées sur la durabilité dotées de robustes indicateurs clés de performance (KPI) peuvent être des catalyseurs efficaces de la transition vers les véhicules électriques, d'autant plus que les critères pour ces secteurs ont été clairement définis dans la taxonomie de l'UE.

Nous avons déjà observé des structures intéressantes qui contribuent à faire avancer la transition vers les VE (notamment l'obligation verte récemment émise par SQM pour aider à financer l'expansion de sa capacité de production de lithium), et nous nous sommes engagés auprès d'autres émetteurs potentiels pour les encourager à suivre des exemples de meilleures pratiques.

De nouvelles émissions d'obligations vertes et basées sur des indicateurs clés de performance dans le secteur accroissent par ailleurs la diversification sur le marché plus large des obligations vertes et aident ainsi les investisseurs à construire des portefeuilles d'investissement plus équilibrés.

Un engagement accru conduit à de meilleurs résultats

La chaîne d'approvisionnement du secteur automobile est gigantesque et complexe. La transition vers les véhicules électriques – en particulier, les exigences en matière de fabrication de batteries et d'infrastructures de chargement – s’accompagne, sur le front ESG, de nouvelles considérations mais aussi d’opportunités d'investissement supplémentaires.

Les gouvernements et les entreprises s'attachent désormais à intégrer des pratiques durables tout au long de la chaîne d'approvisionnement et nous pouvons constater que nos efforts d'engagement ont un impact positif. À mesure que les investisseurs du monde entier mettront davantage l'accent sur leur engagement, nous sommes convaincus qu'ils encourageront l’amélioration de l’ensemble de l'industrie automobile et de ses fournisseurs.

La performance passée, les analyses historiques et actuelles et les prévisions n'offrent aucune garantie quant aux rendements futurs.

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