Impact carbone positif : le rôle prépondérant des fournisseurs de solutions climatiques

15 février 2023
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Avec la montée en puissance des inquiétudes liées au réchauffement climatique, les investisseurs en obligations d'entreprise exigent que les émetteurs contribuent à une solution. Or, les gaz à effet de serre (GES), présents sous une forme ou une autre dans tous les secteurs, se trouvent à l'épicentre de la crise climatique. Si la plupart des entreprises s'efforcent de réduire leurs émissions – leur empreinte carbone –, certaines vont plus loin et tentent de les éliminer complètement en vue de renforcer leur impact carbone positif.

L’impact carbone positif mesure la contribution positive aux enjeux climatiques

Selon une étude publiée lors de la récente conférence sur le climat (COP27) des Nations unies, la planète dispose de neuf ans pour améliorer les trajectoires des émissions de carbone et éviter la catastrophe. Les experts du réchauffement climatique présents à la COP27 ont déclaré que la simple réduction des émissions de carbone était désormais insuffisante pour atteindre les objectifs de neutralité carbone* à long terme. La multiplication d’approches innovantes est désormais indispensable, notamment en matière de prévention.

Pour comprendre le rôle que peuvent jouer la prévention et l'évitement des émissions de carbone dans les divers secteurs, les investisseurs doivent se pencher sur la notion d’impact carbone positif. Tandis que l’empreinte carbone mesure les GES émis par une entreprise† à travers ses opérations et ses prestataires, l’impact carbone positif représente les émissions qui n’atteindront jamais l’atmosphère.

L’impact carbone positif prend en compte les installations et les processus nouveaux ou améliorés qui empêchent, limitent ou évitent directement la production supplémentaire de carbone, que celle-ci provienne de l'entreprise, de ses clients ou de tout autre acteur lié à ses activités. Contrairement à l'empreinte carbone, plus cet indicateur augmente, plus l'impact positif est important. À l'avenir, les entreprises tentant de réduire leur empreinte carbone tout en développant leur impact carbone positif seront de plus en plus nombreuses.

L’impact carbone positif ajoute ainsi une nouvelle dimension à l'investissement obligataire soucieux du climat. En effet, cet indicateur offre une mesure de la contribution positive d'un émetteur à un meilleur environnement. Il renforce également le cadre des normes que les gérants utilisent pour évaluer certaines émissions bénéficiant du label ESG, notamment les obligations vertes. Grâce à une image plus précise du potentiel d'une obligation verte, les gérants peuvent évaluer l'importance de son greenium, à savoir l’écart de rendement négatif entre les émissions vertes et conventionnelles d'une entreprise.

L’impact carbone positif permet d'évaluer les actifs partout dans le monde

Si l’impact carbone positif n’est pas encore systématiquement pris en compte, ce qu’il dit de la production de GES d'une entreprise nous semble utile pour l'ensemble des obligations. Les principaux indicateurs associés peuvent être calculés pour la quasi-totalité des actifs et sont applicables à tous les secteurs. L’impact positif est susceptible de refléter tant un gros chantier de construction d'une nouvelle usine certifiée verte que la simple installation d'un éclairage économe en énergie, et bien d'autres choses encore. Sur la base des recherches menées en partenariat avec la Columbia Climate School, nous pensons que l'énergie solaire et éolienne, l'isolation thermique et les véhicules électriques auront l'impact carbone positif le plus important sur l'évitement des émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030.

L’impact carbone positif, exprimé en tonnes de CO2 prévenues ou évitées, révèle si un émetteur produit plus de carbone qu'il n'en évite. Par exemple, chaque tonne de CO2 émise par un fabricant d'isolants thermiques au cours de sa production se traduit par 200 tonnes de carbone évitées pour ses clients, soit un ratio impact carbone positif/empreinte carbone impressionnant de 200 pour 1 (graphique 1). Ce ratio est susceptible de varier considérablement, notamment selon les types d’entreprises. Ainsi, un ratio relativement faible peut néanmoins refléter une contribution importante à l'évitement des émissions de carbone dans un secteur particulier.

Le ratio impact carbone positif/empreinte carbone indique le poids des émissions de CO2 évitées par rapport aux émissions produites
Le ratio impact carbone positif/empreinte carbone indique le poids des émissions de CO2 évitées par rapport aux émissions produites

Les performances passées et les analyses actuelles n’offrent aucune garantie quant aux rendements futurs.
Fabricant d'isolants thermiques : une tonne de CO2 liée au processus de fabrication permet aux clients d'éviter 200 tonnes de CO2 sur 50 ans ; fabricant de turbines éoliennes : une tonne de CO2 pour produire et livrer une éolienne, contre 45 tonnes de CO2 évitées sur sa durée de vie utile ; fournisseur de carburant durable pour l’aviation : trois tonnes de CO2 pour produire du diesel et du kérosène renouvelables ont permis aux clients de réduire leurs émissions de 10 millions de tonnes en 2020.
Au 30 juin 2020
Source : rapports d’entreprise et AllianceBernstein (AB)

L’impact carbone positif peut faire l’objet d’une évaluation économique

Nos recherches montrent par ailleurs que le coût associé à la réduction ou à l'évitement des émissions de carbone varie considérablement selon les produits et les secteurs. Par exemple, dans la production d'avions de ligne commerciaux, la fibre de carbone (4 dollars par tonne de réduction de carbone) est de loin le matériau le moins cher à mettre en œuvre (graphique 2), principalement parce qu'il est très résistant et que sa légèreté permet d'économiser de l'énergie. En comparaison, les biocarburants et le stockage à froid sont des solutions nettement plus coûteuses pour obtenir un impact carbone positif. Au cours de la prochaine décennie, les innovations devraient cependant entraîner une baisse des coûts, qui favorisera également l'adoption des VE et l'utilisation de matériaux de construction verts.

Les coûts d'évitement des émissions de carbone concernent tous les secteurs
Coût lié à la réduction d’une tonne démissions de carbone par produit/secteur (USD)
Les coûts d'évitement des émissions de carbone concernent tous les secteurs

Au 19 octobre 2022
Source : Université Columbia et AB

Les coûts liés à la réduction des émissions de carbone ont de vastes implications pour la recherche obligataire, et pas seulement dans les secteurs à forte intensité de carbone. Alors que les entreprises de tous les secteurs sont susceptibles de vouloir améliorer leur impact carbone positif, les coûts de mise en œuvre sont loin d’être négligeables. Les entreprises ont dès lors tendance à se tourner vers les solutions les moins coûteuses, comme l'éclairage LED, l'isolation thermique et la fibre de carbone. Dans ce contexte, nos recherches sur les coûts permettent d'identifier les acteurs susceptibles de bénéficier d’une demande accrue.

L’impact carbone positif constitue un outil supplémentaire pour comparer les obligations

En tant qu'outil de comparaison, l’impact carbone positif peut élargir la perspective d'un investisseur obligataire soucieux des enjeux climatiques, notamment s’il recherche des opportunités parmi les obligations vertes, qui offrent des informations sensiblement plus détaillées permettant de comparer les empreintes carbone et les impacts carbone positifs de manière plus granulaire. Par exemple, Brookfield Renewable Partners et Star Energy sont deux émetteurs relativement similaires, tous deux dotés de cadres d'obligations vertes très fiables et d'actifs respectueux de l'environnement. En outre, tous deux sont des fournisseurs d'électricité renouvelable engagés dans la lutte contre le dérèglement climatique. Mais une analyse plus poussée souligne une différence d’impact carbone positif notable.

Sur la base du produit des obligations vertes de Brookfield et de sa production annuelle, son investissement par unité d'énergie produite est légèrement moins coûteux que celui de Star Energy, tandis que ses émissions (empreinte carbone) sont inférieures de pas moins de 24 %.

Cependant, une analyse approfondie montre que Star Energy affiche un impact carbone positif plus important, incluant plus de 700 000 tonnes supplémentaires de CO2 évitées par an, pour un coût par tonne presque deux fois moins élevé que celui de Brookfield. Cela se traduit par un ratio impact carbone positif/empreinte carbone impressionnant de 110 pour 1 (graphique 3).

Deux obligations vertes similaires pour deux impacts différents
Deux obligations vertes similaires pour deux impacts différents

Au 19 octobre 2022
Source : rapports des sociétés et AB

Si des progrès indéniables ont permis de rassembler de nombreux pays autour d'objectifs climatiques communs, le constat dressé par la COP27 est sans appel : le réchauffement climatique reste une menace urgente. Dans les efforts visant à assurer la prospérité économique, les entreprises ont un rôle à jouer.

Les dépenses consacrées aux technologies de décarbonation devront croître de manière exponentielle au cours de la prochaine décennie pour que les entreprises atteignent leurs objectifs de neutralité carbone dans les temps. Ces dépenses massives favoriseront les acteurs qui fournissent des solutions de décarbonation permettant non seulement de réduire les émissions en interne, mais aussi de les éviter sur l'ensemble de la chaîne de valeur, offrant ainsi des opportunités d'investissement attrayantes aux investisseurs obligataires.

* Une économie neutre en carbone est une économie compatible avec la limitation du réchauffement de la planète à 1,5 °C à l'horizon 2050, tel que prévu dans l'Accord de Paris.

† Empreinte carbone : intensité carbone moyenne pondérée

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